Cavalier de la pensée.
Depuis toujours. La maitriser, lui donner du sens, lui donner un sens. Ethologie mentale du dragon de la pensée. Une arborescence demeusurée, implacable, envahissante qui sature tout : mon dragon.
Parfois c’est facile, presque confortable, un équilibre joyeux .
L’humour porteur des fulgurances acceptées en société, un décalage bienvenu qui me donne une place . En rester là , surtout, surtout en rester là.
Entendre des choses et ne pas interroger le sens de celles-ci : le sens de 22 bonhommes qui font vibrer un peuple en courant derrière un ballon, le sens d’une influence d’alignement arbitraire de lumières dans le ciel pour dessiner ton destin, le sens du besoin d’une boite métallique a roulette pour poser son identité, le sens d’un grand barbu imaginaire dans le ciel….. surtout ne pas questionner le sens ; même et surtout si tu veux comprendre, ca ne se fait pas.
On appelle ca : « se prendre la tête » et au vu des réactions et des moqueries ca a l’air très grave comme maladie.
Alors tu établis des stratégies, tu deviens créatif et tu crée des tee shirt pendant 30 ans, tu reste amusant, et tu deviens papa et là tu domines le dragon pour qu’il eclaire tes enfants et pas qu’il les brule.
Pas pour toi, mais pour eux, pour les rendre à l’aise avec les codes, pour qu’ils s’acceptent eux même, pour leur ouvrir leur monde, tu t’impliques, devient associatif, parent d’élève, joyeux luron etc… et entre ta femme qui gère tout avec un tempérament fonceur et toi qui surfe sur une vague sociale acceptable tout se pose.
Bien sur le dragon des pensées pointe le bout de son nez, alors tu sais t’isoler ; la course a pied est un merveilleux refuge reconnu socialement, alors tu cours. Comme d’autres emmènent des barres énergétiques, tu prends avec toi des thèmes de pensée, du Montaigne, de l’astrophysique, des neurosciences, de l’instant présent etc. Tu rentres épuisé le dragon calmé et ca marche.
Puis les enfants grandissent, ta fille part, ton fils ne va pas tarder, chemin faisant ils sont a leur place, sur leur chemin.
Tes masques tombent, trop d’effort à les tenir.
Tu t’ouvres a une nouvelle voie que tu explores depuis des années a travers quelques formations et beaucoup de travail du dragon, tes 35 ans d’arts martiaux trouvent aussi leur place et tu propose un travail sur le corps, la violence, les émotions et la c’est la rencontre l’alter ego, l’alter égale, l’alter régale.
Tu quittes ta femme, liquide ton travail, en trainant une culpabilité infinie, tu soigne la relation avec les enfants, ils t’aiment, acceptent.
Trois ans déjà des satisfactions des retours merveilleux sur mon travail, mais un retrait social. Ne plus faire d’effort, ne plus savoir être anodin, il me faut du sens.
Le dragon fait peur a ta nouvelle compagne, elle en mesure la puissance et le danger. Elle l’a vu faire des merveilles et l’a vu aussi m’absorber tout entier.
Je me coupe du monde, meme si j’aime les gens, mais j’ai parfois l’impression que mon intérêt profond dans la parole de l’autre, mes questionnements à son sujet sont comme des coup de lame que je lui donne.
Alors je nous preserve et ne trouve ma place que quand le cadre est posé en coaching ou en stage .
Librement reconnu et accepté par « l’autre » le dragon illumine et révèle de sa flamme la lumière de chacun. Simplement, humainement, dans un cœur a cœur, un âme à âme, un corps a corps irracontable.
Un hapax qui transforme.
Un révélateur, ni gourou, ni maitre, ni grand moufti, ni grand stroupmf , un simple catalyseur.
J’ai sans doute ce talent ; ok . Et j’en fait quoi ?
Il faut lui donner un visage social acceptable, déterminer une statut juridique, remplir des papiers, faire des projets, démarcher …..
Toutes choses dont je comprends l’utilité mais pas le sens.
Devant un formulaire mon dragon s’emballe : est ce le bon formulaire ? Est ce le bon statut ? N’y a-t-il pas d’autres possibilités plus efficaces ? Pérennes ? Logiques ? Rentables ? je dois vérifier, je dois demander, il faut que ce soit clair, et les impôts ? et combien je vaux ? et si les personnes sont dans le besoin ? et si ils ont plein de sous ? Suis-je legitime ? Je me prend pour qui ?
Argghhhh. Stop le dragon.
Alors je m’assois, je donne a manger au dragon, un peu de philo un peu de méditation, un peu de concept, j’écris un peu comme ce texte, les choses se posent un peu.
Il y aura une accalmie, ca s’est toujours calmé, le dragon s’est toujours apaisé, mais j’avoue que j’ai un peu peur parce que plus je laisse la place a ce que je suis, plus il grandit aussi.
Pour le meilleur ou pour le pire.
Aujourd’hui ce n’est pas le meilleur.
Patience.
Je suis fatigué